Ronald-Peter Stoeferle :

En raison des politiques de taux d’intérêt planchers, les produits d’épargne traditionnels comme les livrets sont devenus de moins en moins attrayants. Vu que leur rendement est quasi nul (note : le taux du Livret A va d’ailleurs passer à 0,75 % en France à partir du 1er août), retirer son argent et conserver le liquide devient plus attractif.

Durant ces derniers mois, une nouvelle facette de la répression financière gagne du terrain : de nombreux supposés grands économistes, des gens comme Paul Krugman et Larry Summers propagent le plus ouvertement possible l’opinion que l’épargne est trop importante et que les investissements sont trop faibles. Afin de compenser ce déséquilibre, les taux d’intérêt devraient être poussés en territoire négatif. D’après la logique keynésienne cela devrait doper la consommation et fournir ainsi à l’économie la stimulation dont elle a tant besoin.

Afin de pouvoir mettre en place des taux d’intérêt négatifs, Larry Summers économiste diplômé de Harvard et ancien secrétaire au trésor des États-Unis s’est tout simplement positionné pour l’abolition mondiale de l’argent liquide à l’occasion d’une conférence de recherche du FMI. Sa présentation ressemble furieusement à une déclaration de guerre contre l’argent liquide. D’après Summers, l’objectif principal de son idée est de permettre aux gouvernements et aux banques d’imposer des taux d’intérêt négatifs. En conséquence, chaque épargnant aurait à payer des frais pour la garde de son argent. L’abolition de l’argent liquide empêcherait ainsi aux gens de se précipiter à leur banque pour retirer leurs économies.

Peter Bofinger, économiste allemand qui est conseiller économique du gouvernement, estime également que les pièces et les billets sont un anachronisme. Il estime également que l’argent liquide est un véhicule de la criminalité : son interdiction pourrait assécher le marché des stupéfiants ainsi que du travail au noir. Cependant, il ne s’agit pas des arguments principaux contre l’argent liquide. Le journaliste Roland Tichy a résumé ainsi le but principal d’une société sans argent liquide : « l’objectif principal est la manipulation des taux d’intérêt et des consommateurs afin d’atteindre les objectifs spécifiques des politiques économiques. » M. Bofinger l’a aussi admis : « avec la disparition de l’argent liquide, la frontière vers les taux zéro saute, plus rien n’entrave la mise en place de taux d’intérêt négatifs. » Pour lui, la zone euro, le Royaume-Uni et la Suisse devraient interdire l’argent liquide simultanément.

Ce faisant, Bofinger rejoint les cohortes grandissantes d’économistes principalement keynésiens qui avancent les mêmes arguments. (…) Pour Willem Buiter, même s’il existe quelques barrières (résistance de la population, utilisation importante de l’argent liquide chez les plus pauvres et les personnes âgées, etc.), ces inconvénients sont « négligeables ».

Il y a cependant une autre bonne raison derrière cette interdiction : vu les obligations légales de réserves très faibles, les banques sont dans un état permanent de « manque de liquidité latente » (ou faillite virtuelle). Les dépôts sont à la base du système fractionnaire de la pyramide du crédit, sur-leveragée. Bannir le liquide est donc le seul outil efficace à la disposition de la junte de l’argent papier pour l’empêcher de sortir du système bancaire.

De plus dans une société sans argent liquide, le patrimoine peut être plus facilement surveillé, contrôlé, taxé et éventuellement exproprié. Ce dernier facteur est probablement essentiel pour les gouvernements qui sont endettés jusqu’à la garde. (…)

Quelques exemples parmi tant d’autres que nous sommes sur le chemin de l’abolition de l’argent liquide

  • En Italie, en Espagne et en Grèce, la détention et l’utilisation d’argent liquide ont déjà été restreintes significativement. Depuis 2011, il est interdit de payer plus de 1500 € en liquide en Grèce. En Italie cette limite est fixée à 1000 €, à 2500 € en Espagne.
  • Au Danemark, on souhaite abolir l’obligation légale d’accepter l’argent liquide en guise de paiement.
  • En Suède, qui fut le premier Européen à introduire l’argent papier, les billets et les pièces ont quasi disparu de la vie quotidienne. En 2012, seulement 2,7 % de toutes les transactions étaient faites en argent liquide contre 9,8 % de la zone euro et 7,2 % aux États-Unis. Si bien qu’aujourd’hui si vous payez en liquide en Suède, les gens estiment qu’il s’agit probablement d’une transaction louche.
  • En France, les paiements en liquide seront plafonnés à 1000 € à partir de septembre 2015. De plus, les bureaux de change sont obligés de conserver les données personnelles de toute personne qui effectue des transactions de plus de 1000 €. Les achats d’or doivent également être rapportés aux autorités ainsi que les envois domestiques de métal, qui curieusement doivent être rapportés aux douanes. Bien entendu, la « guerre contre le terrorisme » est invoquée pour justifier ces mesures.

En Allemagne, le président de la Bundesbank Thiele a une position plus attentiste : « la Bundesbank ne restreindra pas la liberté de choix des consommateurs. Cette décision devrait être prise par le législateur. »

Mais en plus des économistes et des gouvernements, les acteurs du secteur financier chantent aussi la même chanson. Cela n’étonnera personne de la conclusion de MasterCard, dans une étude faite pour l’université d’Oxford et qui affirme que l’argent liquide est sale et malsain. (…)

L’abolition de l’argent liquide et l’implémentation dans la foulée de taux intérêt négatifs ne sont que le prolongement de politiques monétaires erronées. Ce serait le prélude à un totalitarisme économique de type orwellien. Les alternatives, comme l’or et les devises électroniques pourraient évidemment en bénéficier… pour autant qu’elles soient encore légales.

Source : KWN (auteur Ronald-Peter Stoeferle)

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