Interview d’Egon von Greyrz, publiée le 21 novembre 2015 sur KWN :

« Les marchés attendent la décision de la Fed du 16 décembre. Actuellement, la Fed n’a aucune idée de ce qu’elle doit faire. Vu qu’elle ne suit aucune politique à long terme et ne fait que réagir aux événements, elle espère recevoir plus de clarté dans les 26 jours à venir.

Augmenter les taux de 0,25 % donnerait l’impression que l’économie est forte. La raison première en faveur d’une hausse des taux est donc de donner l’illusion que tout va bien aux États-Unis.

Mais Janet Yellen sait parfaitement que les choses sont loin d’être parfaites. Elle sait que le taux de chômage réel n’est pas de 5 % vu que 94 millions de personnes à même de travailler se tournent les pouces. Elle sait également que les risques qui planent sur les États-Unis, comme sur le reste de l’économie mondiale, sont plus grands que jamais.

La dette fédérale américaine est de 18,5 trillions de dollars tandis que sa dette totale est proche des 70 trillions. En plus de ces montants il faut inclure les engagements non provisionnés, qui dépassent les 200 trillions de dollars, sans parler des plus de 500 trillions de produits dérivés sur les taux d’intérêt que les banques américaines possèdent.

Avec une dette et des positions risquées qui totalisent presque 3/4 d’un quadrillion, il ne s’agit pas d’un contexte idéal pour augmenter les taux. De plus, les marchés actions américains surévalués pourront difficilement encaisser une hausse. La bourse américaine arrive au terme de son marché haussier séculaire ; toute mauvaise nouvelle sera le catalyseur d’un marché baissier épique.

Les soucis des subprimes

(…) Les crédits auto deviennent de plus en plus un problème de type subprime, comme c’est aussi le cas pour les prêts étudiants. Le marché des obligations pourries s’est effondré de 33 % durant les quinze derniers mois. Les secteurs du pétrole et du gaz sont bien sûr les principaux responsables mais d’autres sont également sous pression.

La dette des entreprises augmente. Depuis 2009, la dette nette des entreprises est passée d’un trillion à 2,5 trillions. Cette tendance est particulièrement dangereuse dans un contexte de profits en baisse. Mais sur le long terme, la décision de la Fed du 16 décembre n’aura aucune espèce d’importance. L’économie américaine et le dollar tomberont, quoiqu’elle décide, car une économie tant endettée n’est pas pérenne. Je doute qu’elle décide d’augmenter les taux mais ce ne serait pas la première fois que la Fed commette une erreur.

S’il est difficile de prédire ce qu’elle fera, j’estime qu’il est par contre absolument certain qu’au début 2016 la Fed démarrera un nouveau QE qui aura de quoi faire rougir les assouplissements précédents. D’ici quelques années, il ne serait pas étonnant que la Fed ait créé plus d’un quadrillion de dollars.

L’Europe n’est pas en reste

Mais il ne s’agit pas que d’un problème américain. En Europe douze pays ont déjà des taux d’intérêt négatifs en vertu de leur tentative futile de créer de l’inflation. Draghi vient juste d’annoncer que la BCE ferait « ce qui doit être fait pour augmenter l’inflation aussi vite que possible ». Ce qui signifie très clairement que la BCE augmentera son QE en décembre.

Mais cette frénésie de création monétaire n’aura pas d’effets positifs pour l’économie mondiale. Tout ce qu’elle fera, c’est provoquer l’effondrement des devises et créer de l’hyperinflation. La minorité qui possède de l’or et de l’argent physique possédera au moins une assurance qui les protégera contre la destruction totale de leur patrimoine. »

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