Les officiels de la FED, qui se grattent la tête à propos de cette basse inflation chronique, semblent au moins s’accorder sur une chose : ils s’inquiètent tous ou presque de ne pas avoir les outils nécessaires pour combattre la prochaine récession, quelle que soit sa date.
Au lieu de se reposer sur les mesures éprouvées comme la baisse des taux ou les achats obligataires, les responsables de la FED semblent se préparer à des changements plus larges, qui pourraient inclure la fin du régime du ciblage de l’inflation pour une approche encore plus agressive.
Plus important encore, les idées dissonantes proposées à l’occasion d’une conférence de la Brookings Institution par des personnalités telles que l’ancien président de la FED Ben Bernanke, l’ancien conseiller économique de la Maison-Blanche Lawrence Summers et 2 membres actuels de la FED ne font que rendre les perspectives des politiques monétaires encore plus opaques.
Le président de la FED de Boston Eric Rosengren suggère que la Federal Reserve suive le modèle de la Banque du Canada, qui revoit périodiquement son approche pour garantir la stabilité des prix. Il souhaite également voir la FED se tourner vers un objectif de fourchette d’inflation, qui pourrait être de 1,5 à 3 % au lieu des 2 % fixes actuels.
John Williams, président de la FED de San Francisco, souhaite quant à lui voir la FED se fixer pour objectif des niveaux de prix, ce qui signifie que l’objectif des 2 % pourrait être revu à la hausse ou à la baisse afin de compenser les déviations antérieures.
L’inflation américaine est restée obstinément en dessous de l’objectif des 2 % de la FED durant la majorité de la reprise économique, ce qui insinue que le marché du travail n’est pas aussi sain que le taux de chômage de 4,1 %, au plus bas depuis 17 ans, le suggère. La transition vers un objectif de niveau de prix « n’est pas aussi effrayante qu’elle en a l’air », a déclaré Williams devant un parterre de monétaristes, d’économistes, de professeurs d’économie et d’investisseurs.
Il s’inquiète du « problème de la crédibilité » qui émane de cette inflation obstinément basse, qui porte à croire que « la banque centrale n’est pas sérieuse à propos de ses objectifs ». Une période prolongée de basse inflation, qui se reflète dans la faible croissance des salaires, peut réduire l’efficacité des politiques monétaires parce qu’ « elle s’ancre dans les mœurs, ce qui signifie qu’il est plus difficile d’atteindre l’objectif des 2 % lorsque la situation économique est bonne ».
Les 5 relèvements de taux de la FED depuis décembre 2015, après 7 années de taux zéro et 4,5 trillions de dollars d’achats obligataires, sont en partie le reflet d’un désir de reformer un matelas de sécurité en cas de revers économique.
Manque d’outils ou de volonté ?
La présidente de la FED a indiqué que le FOMC pourrait considérer un changement d’approche sous le leadership du nouveau président Jerome Powell.
« En ce moment, le comité de la FED ne discute pas de l’objectif d’inflation », a-t-elle déclaré durant sa conférence de presse de décembre. « Je ne dirais pas que nous n’avons plus de munitions, mais il est clairement reconnu – et j’ai insisté là-dessus moi-même – qu’à terme, nous pourrions l’être, et nous devrons voir comment cela tourne, mais nous pourrions être dans un environnement de taux bas dans lequel il pourrait être utile d’avoir un cadre additionnel pour conduire les politiques monétaires.
Dans ce contexte, je pense que des recherches additionnelles… les économistes académiques et d’autres y réfléchissent très sérieusement, et je pense qu’il est judicieux d’étudier plus en profondeur le fruit de ces recherches. »
Selon Summers, la FED ne dispose pas des outils adéquats pour combattre la prochaine récession, suggérant que ses achats d’obligations, connues sous le nom de QE, n’ont pas fonctionné.
« Je ne suis pas du tout convaincu que les QE sont la panacée pour combattre la prochaine récession », a-t-il déclaré, malgré les nombreuses preuves indiquant que les achats obligataires de la FED ont été très efficaces pour empêcher une crise économique encore plus grave et pour alimenter la reprise économique la plus longue – mais aussi la plus faible – de l’histoire moderne.
Le côté face du mandat de la FED, le plein-emploi, a quant à lui brillé par son absence durant cette conférence. Malgré le taux de chômage à 4,1 %, un plus bas de 17 ans, de nombreuses preuves indiquent que le marché du travail en théorie au plein-emploi est loin de bénéficier à la majorité des travailleurs américains. Parmi ces preuves, il y a la basse inflation en elle-même, qui reflète en partie la faible croissance des salaires.
Peut-être qu’à l’occasion de sa prochaine conférence, la FED devrait se pencher sur ces problèmes.
Article du Business Insider, publié le 9 janvier 2018