La Chine va acheter moins de bons du Trésor américain, nous a appris Bloomberg hier qui cite un rapport officiel. Est-ce très important ?

En apparence tout est simple.

Les matières premières sont cotées sur les marchés internationaux en dollar. Tout le monde a besoin de pétrole, ou de blé, ou de cuivre…

Les Etats-Unis achètent à crédit aux étrangers. Ils exportent leur dette libellée en dollars. Les étrangers qui les fournissent stockent cette dette – des dollars donc. Ceci leur permet d’acheter des matières premières. Ces matières premières sont ensuite transformées et rentrent dans les produits achetés à crédit par les Etats-Unis.

Les Etats-Unis exportent beaucoup de dettes et tout le monde est content. Enfin… pour le moment.

N’oubliez pas, cher lecteur, que nous ne vivons pas dans un monde capitaliste dans lequel on achète comptant, où le crédit est réservé aux investissements et où l’argent prêté a déjà été gagné.

Nous vivons sous l’ère du créditisme. Tout s’échange à crédit et l’inverse du crédit, c’est la dette. La dette mondiale atteint l’équivalent de 233 000 Mds$. Cela fait 33 000 $ par bipède. Il faudrait retrancher les nouveau-nés, ceux qui sont trop vieux pour travailler, et le milliard de gens qui vivent avec moins de 1 € par jour. Si vous travaillez, considérez que votre facture est bien supérieure.

Chacun pense que cela ne le regarde pas et qu’il ne remboursera pas.

Mais revenons à ces fourbes de Chinois. Je dis « fourbes » car les membres du Parti savent très bien comment le créditisme fonctionne. Ils ont toujours acheté des tombereaux de bons du Trésor. C’est ce qu’on appelle des « réserves de change ». Les Chinois en ont pour 1 200 Mds$ précisément, selon Bloomberg… mais vous noterez que déjà en 2016, les Chinois en avaient acheté moins et à l’époque, ils ne l’avaient pas claironné sur Bloomberg.

Chine achats treasuries

Les camarades-capitalistes disent trouver que la dette américaine n’est plus attractive. Il faut dire que le pétrole augmente et que le dollar s’est déprécié de 10% en 2017 face aux grandes devises.

Surtout, les rodomontades de Trump et le protectionnisme défendu par le gouvernement américain les agacent. Le géant des télécoms Huwaei s’est vu récemment rembarré du marché américain. Jack Ma, le fondateur d’Alibaba, qui voulait acheter MoneyGram a reçu une fin de non-recevoir.

A quoi sert d’avoir des dollars si vous ne pouvez pas les réinvestir ou les dépenser aux Etats-Unis ?

CHine obligations américaines

A cette annonce des officiels chinois, l’or a légèrement réagi. Seulement légèrement… Ce n’est pas (encore) la panique. Si les bons du Trésor ne trouvent pas preneurs, la Fed les achètera.

Il y a plus dangereux pour le créditisme que cette histoire de dollar et de Chinois. La hausse des rendements des bons du Trésor US qui continue sa course. Cela signifie que les malheureux qui ont un stock de ces obligations ne peuvent les revendre qu’à perte (ou à la Fed).

Je ne sais pas trop où tout cela va nous mener. Mais l’or – qui n’est la dette de personne – permet d’avoir une assurance anti-catastrophe. Pour le moment, la prime n’est pas encore trop chère.

Pour plus d’informations et de conseils, c’est ici et c’est gratuit.

Simone WaplerArticle de Simone Wapler, via les Publications Agora.

Simone Wapler est directrice éditoriale des publications Agora, spécialisées dans les analyses et conseils financiers. Ingénieur de formation, elle a quitté les laboratoires pour les marchés financiers et vécu l’éclatement de la bulle internet. Grâce à son expertise, elle sert aujourd’hui, non pas la cause des multinationales ou des banquiers, mais celle des particuliers.

Elle a publié « Pourquoi la France va faire faillite » (2012), « Comment l’État va faire main basse sur votre argent » (2013), « Pouvez-vous faire confiance à votre banque ? » (2014) et “La fabrique de pauvres” (2015) aux Éditions Ixelles.