Comme l’a rappelé Steen Jakobsen, en citant le livre de l’ancien président de la FED Volcker, une banque centrale n’est jamais totalement indépendante. Si un dialogue permanent est indispensable pour coordonner les politiques monétaires et fiscales, il y a de la marge entre une discussion saine et des exigences politiques qui sont malheureusement monnaie courante.

On saura peut-être plus tard ce qui a véritablement poussé Powell à faire machine arrière la semaine dernière, mais pour la Maison-Blanche, cela ne suffit pas. Après avoir obtenu d’une manière ou d’une autre l’arrêt des politiques monétaires restrictives de la FED, la Maison-Blanche vient de remettre un coup de pression en demandant une baisse immédiate du taux directeur de 50 points de base. De CNBC :

Le conseiller économique principal de la Maison-Blanche, Larry Kudlow, souhaite que la FED baisse immédiatement son taux directeur de 0,5 %.

« Je me fais l’écho du souhait du président, qui a été clair à ce propos. Il voudrait également que la FED arrête la réduction de la taille de son bilan. Je suis également d’accord avec ce souhait », a déclaré ce vendredi Kudlow à CNBC.

« Si on regarde certains indicateurs… Enfin, je veux dire que l’économie a l’air fondamentalement assez saine, mais nous voulons simplement éviter toute menace », a-t-il ajouté. « Il n’y a pas d’inflation, donc je pense que la FED a probablement été trop loin. »

Les commentaires du directeur du National Economic Council du président Trump ont lieu dans la foulée de la décision de la FED de mettre en pause son programme de hausse des taux. Elle a également suggéré à l’occasion de sa dernière réunion qu’elle pourrait ne plus relever son taux directeur jusqu’à la fin de l’année.

Même si le président de la FED, Jerome Powell, a relevé le ralentissement de l’activité économique à l’étranger, la FED n’a pas indiqué à l’occasion de la dernière réunion de son comité qu’une baisse de taux serait nécessaire. Trump avait critiqué l’intention de la banque centrale d’augmenter le coût du crédit, mais les recommandations de Kudlow expriment l’une des directives les plus explicites envoyées par la Maison-Blanche à la FED.

Kudlow a répété que le président Trump n’avait pas l’intention de remplacer Powell à la tête de la FED.

« Au niveau mondial, il y a beaucoup de faiblesse. En Europe, c’est virtuellement la récession. En Chine, ce n’est pas la grande forme alors que nous négocions sur le dossier du commerce, a poursuivi Kudlow. En l’absence d’inflation, alors que des menaces mondiales planent, notre opinion est que nous ne serions pas contre si la FED baissait son taux directeur. »

La rhétorique de la Maison-Blanche signale également un basculement par rapport aux normes historiques. Les anciens patrons de la FED, d’Alan Greenspan à Janet Yellen, ont insisté sur l’indépendance de la FED concernant ses politiques monétaires, qui ne devraient pas être influencées par l’agenda politique.

L’idée est de permettre à la FED de prendre des décisions parfois impopulaires, comme une hausse des taux, à l’abri des pressions de politiciens souhaitant présenter un bilan économique favorable à court terme.

L’année dernière, Trump a déclaré que la banque centrale était « devenue folle » avec ses hausses des taux. Il a remis sur le dos de Powell la baisse de la Bourse en annonçant qu’il n’était « pas heureux » de la décision de « loco Powell » de poursuivre sa hausse des taux en 2018.

En réponse à ces commentaires peu avenants d’octobre dernier, Kudlow a déclaré que « nous savons tous que la FED est indépendante. Le président ne lui dicte pas sa politique, il n’a rien dit de tel ».

Soit, tout comme il ne disait pas en 2011 que les « politiques irresponsables de la FED de taux bas et consistant à inonder le marché de dollars doivent être stoppées sans quoi nous connaîtrons une inflation record« .