Egon von Greyerz : « j’examine les pressions déflationnistes que nous observons dans de nombreuses régions, comme en Europe et au Japon. Une déflation continue mènera à l’implosion du prix des actifs et de la dette des banques. Dans ce scénario, aucune dette ne sera remboursée et le système financier s’effondrera.

Avec une dette mondiale de 280 trillions de dollars et des dérivés pour 1,5 quadrillion de dollars, cet effondrement ramènera le monde 50 ans en arrière, peut-être même encore plus loin. Les gouvernements et les banques centrales sont totalement conscients de ces risques déflationnistes. C’est la raison pour laquelle ils ont créé des dizaines de trillions de dollars, et baissé les taux d’intérêt à zéro.

Mais jusqu’à présent, toute cette création monétaire et ses stimuli n’ont eu aucun effet. Le système bancaire européen et sous une pression énorme, il ne survivra pas sans des injections massives de liquidités. Malgré le message optimiste diffusé par l’Union européenne et les gouvernements européens, l’Europe du Sud est en train de couler petit à petit dans la Méditerranée, et cela inclut la France.

Cette zone, et d’autres pays comme le Japon, sont des régions qui n’ont aucune chance de survivre à la crise de la dette. Même l’Allemagne commence à ralentir, les taux d’intérêt allemands sont maintenant négatifs. Et concernant les États-Unis, il règne en ce moment un optimisme déplacé qui estime que tous les problèmes ont été résolus.

La Fed ne sait pas où elle va

Il n’est pas surprenant qu’après avoir injecté des dizaines de trillions de dollars et baissé les taux à zéro, il y ait un peu d’optimisme à court terme. Les grands bénéficiaires de tout ceci sont évidemment les investisseurs sur les marchés, les banquiers et quelques grosses sociétés. Mais les pauvres deviennent encore plus pauvres, encore plus endettés. Les montants alloués aux aides sociales ne cessent d’augmenter. Nous savons également que les statistiques américaines sont trompeuses, et même souvent complètement fausses. Le chômage calculé de façon cohérente est à 22 %, et la croissance, ajustée à l’inflation, baisse… Tout comme les salaires.

Le mandat de la Fed consiste en 3 objectifs : plein-emploi, stabilité des prix et taux à long terme modérés. Elle est également responsable des politiques monétaires et de la stabilité du système financier, ainsi que de la supervision des banques, bien sûr.

Avec un chômage de 22 %, l’objectif est manqué sur ce front. En ce qui concerne la stabilité du système financier, la Fed a fait le contraire. Avec sa création monétaire et sa manipulation des taux d’intérêt, elle a créé le système financier le plus instable et dangereux de l’histoire.

Les marchés, dopés par la liquidité, semblent roses, alors que sous la surface il s’agit d’un œuf pourri. Il suffit d’observer les taux à court terme des Treasuries pour s’en convaincre. En 2000, ils étaient à 6 %. Les marchés actions ont ensuite baissé et les taux ont été abaissés jusqu’à 1 % en 2003, suite à une série de décisions prises dans la panique.

Les marchés actions se sont améliorés et les taux ont été remontés jusqu’à 5 % en 2006. Nous avons eu ensuite la grande crise financière de 2007. La Fed a de nouveau paniqué pour abaisser ses taux jusqu’à 0 % en 2008, et depuis ils n’ont plus bougé.

Tout cela signifie que la Fed ne suit aucun fil conducteur, qu’elle n’honore pas son mandat. Elle ne fait que réagir aux événements, que nous avions prédits en raison de leur inévitabilité, mais que la Fed n’a jamais vu venir. »

Source : interview sur KWN du 29 août d’Egon von Greyerz

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