La France vient juste de recevoir le rappel d’une réalité bien gênante : les banques françaises détiennent pour 277 milliards d’obligations italiennes, soit 14 % du PIB de l’Hexagone. Tandis que le gouvernement italien est en plein bras de fer existentiel avec la Commission européenne et la BCE concernant son budget 2019, les conséquences pourraient être lourdes pour la France.

La France en appelle au dialogue

Vendredi, Bruno Le Maire, ministre des Finances français, a appelé la Commission au dialogue avec l’Italie après que celle-ci ait rejeté le projet italien de budget 2019 car il enfreint les règles de déficit. Si Le Maire a déclaré que l’éventuelle contagion à la zone euro était clairement contenue, il a reconnu que celle-ci « n’est pas suffisamment armée pour faire face à une nouvelle crise économique ou financière ». Comme le ministre des Finances français le sait très bien, une crise financière en bonne et due forme en Italie finirait par se propager à l’économie française via le canal principal des banques hexagonales.

La France n’est pas le seul pays de la zone euro qui est exposé de façon malsaine à la dette italienne. Mais sa situation est de loin la plus préoccupante. D’après la BRI, les institutions financières allemandes détiennent pour 79 milliards d’obligations italiennes. Les banques espagnoles pour 69 milliards. Ce qui signifie que la première, la seconde et la quatrième économie de la zone euro détiennent pour plus de 415 milliards d’euros d’obligations italiennes.

Si l’exposition des banques allemandes à la dette italienne a baissé durant ces dernières années, le contraire prévaut pour la France. Ce qui dément les déclarations de la BCE quant à son QE, qui était censé réduire l’interdépendance entre les banques et les pays.

C’est tout le contraire qui s’est passé : à cause des efforts incessants de contrôle des taux de la BCE (en faisant « tout ce qui est nécessaire » pour éliminer tout risque sur le marché obligataire), les banques ont pu empocher des bénéfices en achetant des quantités industrielles d’obligations « couvertes » par la BCE.

Il y a quelques années, les nations les plus conservatrices telles que l’Allemagne, les Pays-Bas et la Finlande ont tenté de mettre un terme à ces pratiques. Mais les Français, les Italiens et les Espagnols, ainsi que les banquiers, se sont fermement opposés à ce changement. Ils craignaient l’enclenchement d’une véritable tempête sur les marchés.

Aujourd’hui, un tel scénario n’est pas impossible. Les remous autour du budget italien ennuient les investisseurs. Cela se remarque notamment sur l’écart de rendement entre les obligations allemandes et italiennes sur 10 ans. (…)

L’Italie va droit dans le mur

Lorenzo Bini Smaghi, ancien membre du directoire de la BCE, pense que l’actualité en Italie est similaire à ce qui s’est passé à la veille de la crise de la dette européenne en 2011, lorsque la hausse des taux avait provoqué une contraction massive du crédit.

« L’Italie va droit dans le mur », a-t-il déclaré. « L’économie risque de basculer en récession durant le dernier trimestre. Les banques ont déjà réduit l’accès au crédit durant l’été, dès que les écarts se sont mis à augmenter. Le gouvernement italien ne l’a pas compris. Il ne voit pas encore le mur, mais le crash sera violent. »

Source : article de Don Quijones, publié le 30 octobre 2018 sur WolfStreet.com