Nos chers amis à la tête de la FED ont relevé de 0,25 % le taux directeur américain hier. Il s’agit de la quatrième hausse depuis décembre 2015, et la troisième en 6 mois. Janet Yellen est officiellement sur le pied de guerre.

D’après Phoenix Capital, « la FED est embarquée dans un cycle de serrage de vis sérieux. Un relèvement peut être anecdotique. Deux relèvements une erreur de politique. Mais trois hausses, cela signifie que la FED est déterminée ».

La FED ne serait-elle pas en train de répéter « l’erreur de 1937 » ? Frappée de plein fouet par le crash de 1929, l’économie américaine se relevait de son lit de convalescente en 1936. La croissance annuelle, et réelle, grimpait de façon constante. Le chômage baissait, passant de 25 % à 14 %. Mais arrivé en 1936, la Federal Reserve commença à s’inquiéter, de peur de semer les graines de l’inflation. Elle pensait que ses politiques monétaires accommodantes avaient fait assez, elle craignait que leur poursuite engendre une surchauffe. Elle a cru que le patient pouvait désormais marcher sans béquilles. Qu’il était temps d’un retour à la normale.

Christina Romer, ancienne patronne du Council of Economic Advisers, a déclaré dans l’Economist :

« En 1936, la FED a commencé à s’inquiéter de sa stratégie de sortie. Après plusieurs années de politiques monétaires relativement accommodantes, les banques américaines détenaient des réserves excédant de façon importante les minimums légaux. Les décideurs monétaires craignirent que ces réserves excédentaires puissent compliquer un éventuel serrage de vis en cas de développement de l’inflation ou si les excès spéculatifs devaient regagner Wall Street. »

Nous ne pouvons nous empêcher de nous demander… Ces conditions ne nous rappellent-elles pas ce que nous connaissons aujourd’hui ? Au moins un petit peu, non ?

En 1936, la FED décida d’agir. Mais le patient n’était pas aussi revigoré que le pensait l’autorité médicale. Et il rechuta rapidement.

Le PIB réel a chuté de 10 % entre mai 1937 et juin 1938. Le chômage remonta, passant de 14 à 20 %. Cette récession au cours d’une dépression fut le troisième revers économique le plus important des États-Unis du XXe siècle. La FED a ressorti sa trousse de secours en 1938 pour mettre un terme à la récession. Mais Romer avertit que le précédent de 1937 « devrait servir d’avertissement ».

La FED voulait normaliser la situation, tout comme la banque centrale américaine souhaite le faire aujourd’hui. « Le besoin de crier victoire et de normaliser les politiques après une crise économique est important », affirme Romer. L’économie était trop faible pour tenir debout toute seule en 1937. Et quid de notre économie actuelle ?

La croissance du T1 fut de seulement 1,2 %. L’inflation (officielle) est en dessous de l’objectif de 2 % de la FED. Le terme surchauffe ne semble donc pas approprié.

Mais la FED ne relève pas ses taux pour empêcher une telle surchauffe. Selon Jim Rickard, elle souhaite simplement refaire le plein de munitions pour pouvoir agir durant la prochaine récession. Selon Jim, le taux directeur de la FED doit être autour des 3 % afin de lui permettre d’entamer un nouveau cycle de baisse des taux lorsque la prochaine récession, inévitable, se déclarera.

Le relèvement d’hier signifie que les taux sont aujourd’hui entre 1 et 1,25 %, toujours à des kilomètres de ces 3 %. À ce rythme, la FED n’atteindra pas son objectif avant la mi-2019… si elle y parvient.

Bank of America a dressé le portrait de l’historique intégral des cycles de serrage de vis monétaire (de ces 100 dernières années). Voici sa conclusion :

« À chaque fois que la FED s’engage dans un processus de relèvement des taux, les États-Unis tombent. »

L’histoire montre que sur 19 cycles de relèvement des taux, 16 ont terminé en récession, soit dans 84 % des cas. Que ce soit à cause d’un « événement » financier ou d’un malaise économique généralisé, les preuves sont irréfutables : les hausses agressives des taux sont accompagnées d’ennuis économiques.

hausse des taux et crises : historique

Malgré cela, la FED s’est engagée sur une telle voie. D’où la question : la FED va-t-elle engendrer une autre récession, du genre de celle de 1937, ou l’un des « événements financiers » répertoriés sur le graphique ci-dessus ?

Jim Rickards le pense. Il pense que la FED serre la vis dans une période de faiblesse économique, et qu’elle devra faire machine arrière en 2017. Nous osons espérer qu’il a tort, tout en craignant qu’il pourrait avoir raison. La seule leçon que nous pouvons tirer de l’histoire, c’est que nous n’en tirons jamais les leçons… »

Article de Brian Maher, publié le 15 juin 2017 sur DailyReckoning.com