La Russie, via sa banque centrale, a pris depuis quelques années l’habitude d’augmenter chaque mois ses réserves d’or. En décembre 2016, elle a cependant effectué une pause, pour ensuite se remettre plus que jamais à l’achat en janvier. Selon Hebba Investments, cela s’explique par des raisons purement politiques, ce qui signifie que le réchauffement des relations entre la Russie et les États-Unis n’aura été qu’un court intermède :

« La Banque centrale russe a récemment publié les derniers chiffres concernant ses réserves d’or pour janvier. Les investisseurs noteront qu’il s’agit d’un virage à 180 degrés par rapport à ce qu’il s’est passé en décembre.

En janvier, la Banque centrale russe a décidé d’acheter 1 million d’onces d’or, une grosse différence par rapport à son abstention de décembre 2016.

Des motivations politiques ?

Cela fait un moment que nous affirmons que les achats d’or de la Russie ne sont pas que des décisions purement financières, mais également assez politiques. L’or est une devise de réserve, il s’agit de la seule alternative réelle au dollar américain. Donc, les pays qui souhaitent miner le dollar, peu importe la raison, ont tout intérêt à se diversifier avec l’or.

Il ne s’agit pas d’une théorie logique, mais de ce qu’il s’est passé. Juste avant l’élection présidentielle américaine, la Russie a effectué ses plus gros achats mensuels de métal jaune depuis des décennies, lorsqu’on s’orientait vers une victoire de Clinton (et un impossible régime américain antirusse). Ensuite, en décembre, alors que l’or était bien en dessous des 1200 $ l’once (et donc attractif d’un point de vue strictement financier), les Russes n’ont pas acheté d’or durant ce mois, un changement frappant de comportement. Était-ce dû à un regain d’optimisme pour les relations américano-russes avec l’arrivée d’un régime Trump ?

Si nous étions légers et que nous affirmions que la Russie achète de l’or en fonction du climat politique, il semblerait que le pessimisme l’ait emporté suite à ses derniers achats. Le million d’onces dont elle a fait l’acquisition en janvier (à un prix plus élevé qu’en décembre) équivaut à l’un des plus gros achats mensuels de la Russie de la dernière décennie.

Que cela signifie-t-il pour les investisseurs ? En ce qui concerne l’or, les relations internationales font une énorme différence vu qu’elles indiquent les tendances à venir sur le front des réserves monétaires. Lorsque des pays ne se font pas confiance mutuellement, ils ont tendance à acheter de l’or étant donné qu’il s’agit d’une méthode sûre de diversification de ses réserves sans acheter des obligations des pays offenseurs. Lorsqu’il s’agit d’éviter le dollar, l’or est encore plus attractif puisqu’il s’agit de la seule alternative réaliste.

C’est ce que nous pensons que la Russie fait : elle achète de l’or en tant que substitut à ses réserves en dollars, et le fait que les achats russes de janvier aient été si importants indique peut-être qu’il n’y aura pas de détente dans les relations américano-russes.

Les achats russes vs la production annuelle d’or

Tandis que les mines d’or de la planète produisent de 90 à 100 millions d’onces environ chaque année, les achats mensuels de janvier de la Russie, pour rappel 1 million d’onces, sont significatifs par rapport à la production mondiale. À un rythme annualisé de 12 millions d’onces, cela signifie que la Banque centrale de Russie absorberait de 12 à 15 % de la production mondiale, ce qui est énorme.

Les investisseurs ne doivent pas perdre de vue que même si des milliards de dollars sont échangés chaque jour sur les marchés de l’or, la vaste majorité de ces transactions concerne les marchés papier ; les transactions portant sur l’or physique représentent un très faible pourcentage de ces volumes. Lorsqu’il s’agit des banques centrales, on parle bien d’achats d’or physique, l’impact peut donc être très important, notamment si d’autres banques centrales, ou entités, les imitent.

Les points à retenir pour les investisseurs

Même si nous sommes pessimistes pour l’or à court terme, ce genre d’événements continue de renforcer notre opinion que l’or est un excellent investissement à moyen et à long terme. Non seulement les achats récents d’or de la Russie absorbent de 12 à 15 % de la production mondiale mais plus important encore, ils signifient que les points de vue internationaux s’éloignent au lieu de se rapprocher.

Inverser la mondialisation a des conséquences bien plus vastes que sur la production de gadgets bon marché, notamment sur les structures financières mondiales et les devises associées, par exemple les monnaies de réserve. Le manque de confiance soutient l’or, il s’agit de la seule monnaie de réserve indépendante de tout État, au contraire du dollar. L’or prospère donc durant les périodes de défiance et de nationalisme. Les achats russes pourraient bien signaler qu’un Kumbaya mondial n’est sûrement pas pour demain.

Donc les investisseurs à long terme doivent appréhender ceci en tant que facteur positif, et ne jamais perdre de vue la situation d’ensemble lorsqu’il s’agit de l’or. Nous ne voyons pas de raison de ne pas considérer une exposition importante à l’or via le métal physique et les ETF. De plus, les minières qui ont sous-performé l’or durant ces derniers mois pourraient conférer aux investisseurs un effet de levier considérable dans l’éventualité d’une hausse du cours de l’or. Les investisseurs intéressés par cette proposition peuvent envisager l’évaluation de sociétés minières comme Goldcorp (NYSE:GG), Agnico-Eagle (NYSE:AEM), Newmont (NYSE:NEM) (nous ne recommandons pas spécifiquement ces sociétés, nous ne faisons que les suggérer pour recherches approfondies).

Les investisseurs doivent être patients et comprendre qu’il y a beaucoup d’intérêt à conserver de l’or malgré le sentiment négatif. »

Source : article publié sur SeekingAlpha.com le 10 mars 2017