Récemment, nous avons consacré un article au niveau d’endettement alarmant des ménages américains. Après avoir appuyé sur la pédale de frein suite à la crise de 2008 durant environ 2 ans, ils se sont remis de plus belle à utiliser leurs cartes de crédit ou à recourir au crédit auto.

Ce qui n’est évidemment pas sans conséquence alors que l’économie US, sans afficher une santé catastrophique, n’est pas non plus en forme olympique quand on gratte sous la surface du pseudo plein-emploi et d’une croissance respectable. Comme l’explique cet article de Zero Hedge, les retards de paiement des particuliers sur leurs dettes de carte de crédit, leurs crédits auto et leur prêt étudiant commencent à bouger du côté des petites banques.

Comme la FED l’a rapporté il y a 2 semaines seulement, la dette des ménages américains, crédits hypothécaires exclus, n’a jamais été aussi élevée. Au 31 décembre 2017, les particuliers détenaient un montant record de dette :

  • un trillion de dollars sur les cartes de crédit/lignes de crédit ;
  • 1,3 trillion de dollars de crédits auto ;
  • 1,5 trillion de dollars de prêts étudiants.

Parmi ceux-ci, les crédits auto et les cartes de crédit en particulier affichent des retards de paiement qui s’accélèrent. En conséquence, les sociétés prêteuses et les banques ont commencé à augmenter leurs provisions afin de disposer des réserves nécessaires vu l’anticipation d’une hausse des défauts. Le graphique ci-dessous met en exergue le « Net Charge Off Rate » (pourcentage des montants prêtés qu’une institution de crédit estime ne pas pouvoir récupérer dans le futur en raison des défauts) des sociétés de cartes de crédit, qui n’a jamais été aussi élevé depuis des années. (…)

Cet autre graphique de TCW montre également que les coûts anticipés par les défauts futurs pour l’ensemble de l’écosystème bancaire américain se sont remis à progresser depuis le plus bas du T4 2015 (2,9 %). Hasard ou pas, cela coïncide avec le trimestre précis durant lequel la FED a commencé à relever son taux directeur, même si ce fut modestement.

Pourquoi cette augmentation minime du Net Charge Off (NCO) Rate n’inquiète pas la majorité des économistes quant à l’état de santé financière des ménages américains ? C’est simple : les grandes banques américaines qui dominent le marché de la carte de crédit se sont focalisées sur les marchés prime et super prime suite à la crise financière, tout en bénéficiant de conditions de financement avantageuses grâce aux politiques de la FED concernant les taux.

Cependant, depuis 2015, la FED a commencé tout doucement à relever son taux directeur tandis que les NCO ont commencé à grimper, il est vrai à partir d’un niveau très bas. Au T3 2017, ils étaient à 3,6 %, en route pour atteindre les 4 %, soit un niveau similaire à ce que l’on a connu durant la fin des cycles économiques de 2000 et de 2008.

Mais voici une découverte étonnante.

Comme Chet Melhotra de TCW le note, ce sont les petites banques américaines, celles qui ne se trouvent pas dans le top 100 en termes d’actifs, qui ont connu durant ces derniers mois une augmentation notable du risque de défaut de paiement. Du côté de ces institutions bancaires, les NCO ont grimpé à 7,9 %, soit au même niveau que l’on a connu juste avant la dernière crise financière. Autrement dit, pour savoir où se cache le détonateur de la prochaine crise du crédit des particuliers, oubliez les grandes banques et concentrez-vous sur les petites.

Bizarrement, cette explosion des NCO des petites banques est largement ignorée par les médias dominants, qui ont pour habitude de se concentrer sur les chiffres globaux ou sur les grandes banques. Et TCW de s’interroger : « S’agit-il simplement d’une anomalie, ou le signe d’une tendance similaire à venir du côté des grandes banques ? »

L’avenir le dira : le NCO pourrait augmenter du côté des grandes banques dans le cadre d’un phénomène de milieu de cycle engendré par la hausse des taux de la FED, comme ce fut le cas dans les années 90, alors qu’il se stabiliserait ou s’inverserait même pour les plus petites.

Cependant, comme le note TCW, même s’il est possible que cette hausse bénigne du NCO soit anodine, « c’est loin d’être un acquis selon nous vu l’augmentation de l’endettement global du système financier exprimé en termes de ratio crédit bancaire/PIB, qui est actuellement de 63 %, soit un niveau que l’on n’a plus connu depuis 2008 ». Cette observation est appuyée par le graphique ci-dessous :

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