Mes chères impertinentes, mes chers impertinents,

Je laisse tout de suite la parole à Patrick Artus, et je vous livre un résumé rapide, pour ceux qui ne pourront pas visionner tout de suite la vidéo, de ce qu’il vient de dire.

« J’ai quand même un certain malaise avec la situation de l’économie mondiale. »

Un taux d’endettement qui continue d’augmenter, des gains de productivité qui n’arrêtent pas de baisser, et une masse de liquidité en circulation énorme, nous fabriquons un mélange assez détonant.

Il y aura donc un jour une crise de la dette.

Certains disent que ce sera en Chine, je n’y crois pas, car c’est une situation qui est très maîtrisée par l’État. C’est des entreprises d’État qui empruntent à des banques d’États.
Ça peut être le Japon, les USA.

Si quelque chose d’ennuyeux se produit aujourd’hui, notre capacité de réaction est particulièrement réduite.

Taux à 0, déficit budgétaire au-dessus de 3 %, si quelque chose de vilain se produit, alors nous n’avons pas de marge de manœuvre.

Il faut donc impérativement normaliser les politiques monétaires. Si on ne le fait pas, on ne le fera jamais, et si on ne le fait jamais, la prochaine fois que l’on aura une vraie récession on ne pourra rien faire…

Il est un poil pessimiste notre Patrick Artus tout de même, vous ne trouvez pas ?

Combien de temps peut-on imprimer de la monnaie sans que rien ne se passe ?

Voilà la vraie question. Et vous savez quoi ? Je faire preuve, pour une fois, d’un optimisme surprenant (enfin pas trop non plus, rassurez-vous) !!

Pour Artus, il faut normaliser les politiques monétaires car sinon nous ne pourrons rien faire à la prochaine crise… C’est vrai, si nous raisonnons de manière « conventionnelle ». Si nous raisonnons de manière non conventionnelle, alors nous pouvons imaginer tout un tas de choses. La question sera l’acceptabilité de ces choses pour qu’elles ne déclenchent pas de défiance sur les monnaies et là, cela devrait très bien se passer et je vais vous dire pourquoi.

Mais avant, posons une autre question. C’est bien de demander une normalisation des politiques monétaires mais cette normalisation, aussi souhaitable soit-elle, est-elle seulement… possible ?

La réponse à mon sens est non. Si nous augmentons trop les taux d’intérêt, alors nous étoufferons le peu de croissance économique mondiale qu’il y a, nous provoquerons des déplacements de flux financiers énormes qui partiront de certains pays dits émergents pour venir se replacer sur les monnaies comme l’euro et le dollar évidemment, et en plus nous créerions toutes les conditions d’un krach obligataire d’anthologie qui ruinerait les épargnants.

Dans une économie basée sur la dette, c’est le prix ou plus précisément le coût de la dette qui est le juge de paix de toutes les analyses. Si vous augmentez le coût de la dette dans des économies surendettées, alors vous risquez de précipiter de nombreux acteurs vers l’insolvabilité. Je le sais, vous le savez, et évidemment les banques centrales le savent et c’est précisément la raison pour laquelle elles ne normalisent pas leurs politiques monétaires justement. En réalité, elles ne le peuvent pas, elles ne le peuvent plus.

Alors peut-on continuer encore longtemps comme cela ?

Je ne peux pas vous dire exactement combien de temps, cela serait bien présomptueux de ma part, mais pour le moment, oui, cela peut durer et sans créer de défiance ou de problème de confiance vis-à-vis des monnaies.

Mais il y a des conditions pour que cela soit possible.

1re condition : rendre ces politiques invisibles en menant toutes les mêmes !

En gros, si la BCE baisse ses taux, l’euro baisse… Mais l’euro baisse par rapport aux autres monnaies. Si les autres monnaies baissent aussi leur taux ou injectent aussi de la monnaie dans des quantités identiques, alors dans un système de changes flottant, toutes les monnaies vont baisser ensemble.

Si toutes les monnaies baissent ensemble alors vous ne les voyez pas baisser, puisque vous ne pouvez les voir baisser que par rapport à un étalon qui, lui, est par définition fixe !!

Ceux qui viennent de penser à l’or ont eu une bonne pensée. C’est la raison pour laquelle on ne veut pas que vous regardiez l’or qui est un étalon fixe de la baisse de valeur de toutes les monnaies papier actuelles.

2e condition : forcer le cours des monnaies et obliger la confiance !

Vous allez me dire, cela ne fonctionne pas de forcer le cours des monnaies. C’est vrai. Mais dans une certaine mesure, si. Surtout si vous incitez plus que vous ne forcez.

Je m’explique : actuellement, nous parlons de monnaie papier, mais en réalité nous avons tort, nos monnaies sont déjà électroniques car nous payons par carte bleue, par virement et par prélèvement. Les espèces et les chèques ne représentent déjà presque plus rien en soi au niveau des masses monétaires existantes.

Les masses monétaires sont avant tout électroniques et le seront de plus en plus.

Dans des économies gérées par des monnaies dématérialisées, quelles alternatives avez-vous en cas de problème de confiance ? Aucune ! Vous n’avez même plus droit au cash et aux billets. Au niveau de la loi, si vous achetez plus de 1 000 euros en espèces, vous êtes un terrible terroriste.

Cela signifie de manière implicite que le cours de la monnaie électronique est forcé… C’est donc de la confiance forcée car sans échappatoire, et ça c’est totalement nouveau. Inédit en termes économiques.

3e condition : ne pas augmenter les salaires !

Et là, croyez-moi, aucun problème de ce côté-là ! Vous serez tous à l’abri du pognon et des augmentations. Entre la robotisation, l’informatisation, l’immigration, les délocalisations, le dumping fiscal, social et autre, les salaires n’ont aucune raison de tendre vers des sommets.

En résumé, si tout le monde continue à faire pareil, si le cours de la monnaie est forcé sans avoir trop à le dire, et si les salaires sont maîtrisés, alors les banques centrales peuvent encore imprimer quelques milliards sans que cela ne pose de problème surtout si…

4e condition : imprimer pour racheter des actifs et des titres de dettes afin d’assurer la liquidité des marchés

Les banques centrales n’injectent pas directement d’argent dans l’économie. Elles rachètent des titres correspondant à de l’argent qui a déjà été injecté dans l’économie réelle.

Si l’État français dépense 1 milliard d’euro aujourd’hui, il le dépense aujourd’hui. Si la BCE rachète cette obligation d’un milliard demain, cette opération n’injecte pas d’argent dans l’économie réelle directement. C’est une opération comptable. Si les déficits budgétaires se limitent à 3 ou 4 % par an refinancés par les banques centrales, cela peut durer encore longtemps et c’est exactement ce qu’il va se passer.

La bonne nouvelle c’est que cela peut durer encore. La mauvaise c’est que cela ne durera pas toujours et que l’on connaît l’issue : la dictature monétaire progressive plus ou moins coercitive pour retarder le plus longtemps possible l’effondrement s’accompagnant de la création de bulles financières de plus en plus importantes et vous les voyez sous vos yeux, qui montent, qui montent, je parle des actions, des obligations et de l’immobilier. Et un jour… paf !

Il est déjà trop tard, mais tout n’est pas perdu. Préparez-vous !

Charles SANNAT

 

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