Les poids lourds de la finance qui recommandent l’or sont de plus en plus nombreux. Si Ray Dalio avait déjà fait des commentaires favorables récemment, il s’est fendu d’un long article publié sur son compte LinkedIn qui ne laisse aucun doute sur sa stratégie : vendre des actions et acheter de l’or.

« L’un de mes principes d’investissement est le suivant : identifiez le paradigme dans lequel nous sommes, analysez-le afin d’établir s’il est viable et si ce n’est pas le cas, visualisez vers quel paradigme nous nous dirigeons.

Durant ma carrière d’investisseur macro longue d’environ 50 ans, j’ai remarqué que les marchés opèrent d’une certaine façon (ce que j’appelle paradigme). Les gens s’y adaptent, tellement que tout le monde finit par faire la même chose. Ce qui débouche sur le basculement vers d’autres paradigmes qui font que les règles sont bouleversées. Identifier et naviguer habilement ces changements de paradigme, structurer son portefeuille afin de se prémunir des effets de ces changements est critique afin de réussir en tant qu’investisseur. »

Dalio propose ensuite un résumé des paradigmes de chaque décennie depuis les années 20. Pour la décennie actuelle, il la résume par le terme « relance ». Il écrit :

« Le basculement vers le paradigme de cette décennie, qui a coïncidé avec les plus bas des marchés et de l’économie, a eu lieu à la fin de l’année 2008/ début de l’année 2009 lorsque les primes de risque étaient extrêmement élevées, les taux d’intérêt étaient à zéro et quand les banques centrales commencèrent leurs assouplissements quantitatifs agressifs. Avec l’argent reçu en échange de la vente de leurs actifs aux banques centrales, les investisseurs en ont acheté d’autres. Cela a poussé le prix des actifs financiers à la hausse, a fait baisser les primes de risque ainsi que les rendements anticipés de toutes les classes d’actifs. Comme durant les années 1932-1937, cela a débouché sur une hausse importante du prix des actifs, ce qui a creusé les inégalités.

Simultanément, la mondialisation et l’automatisation ont eu un impact sur les salaires, particulièrement sur les petits revenus et les salaires moyens, la plupart des gains étant empochés par les cadres supérieurs et les sociétés elles-mêmes. La croissance est faible, tout comme l’inflation. Les actions ne cessent de grimper en raison des stimulations des banques centrales, de marges qui restent élevées notamment grâce à l’automatisation, mais aussi plus récemment grâce aux baisses d’impôts aux États-Unis. Ce creusement des inégalités a alimenté la montée du populisme. Aujourd’hui, les prix des actifs sont relativement élevés, les actifs sont valorisés sur base d’une croissance qui restera modérément forte ainsi que d’une inflation basse.

Le changement de paradigme à venir

Je ne sais pas exactement quand ou comment le prochain changement de paradigme aura lieu, mais voici ce que je pense être fortement probable dans les années à venir :

  • Les banques centrales seront à court de stimulations pour doper les marchés et l’économie lorsqu’elle faiblira ;
  • Il y aura une énorme quantité de dettes et d’obligations (retraites, soins de santé, etc.) qui vont augmenter et qui ne pourront être financées avec les actifs.

Autrement dit, je pense que le paradigme dans lequel nous nous trouvons prendra fin lorsque les taux réels seront si bas que les investisseurs qui possèdent la dette voudront s’en débarrasser pour acheter quelque chose qu’ils considèrent supérieur.

Simultanément, les énormes besoins d’argent pour financer les engagements contribueront au « grand étranglement ». Lorsque nous y serons, il n’y en aura simplement pas assez pour satisfaire les besoins. Nous assisterons alors à la monétisation d’énormes déficits, à des dévaluations et à des hausses massives des impôts. Cela devrait attiser la polarisation entre les capitalistes nantis et les socialistes sans le sou. Il est fortement probable que durant cette période, les créditeurs recevront un rendement nominal ou réel très bas, voire négatif. De facto, il s’agira d’un impôt sur la richesse.

Actuellement, pour environ 13 trillions de dollars d’actifs ont un rendement nul ou négatif. Cela signifie que ces obligations n’ont aucune valeur lorsqu’il s’agit de créer un revenu. Au mieux, on peut les considérer en tant que véhicule sûr pour parquer son principal. Les investisseurs enregistrent néanmoins une plus-value lorsque les taux continuent de baisser, c’est pourquoi ils achètent de tels actifs.

Mais cela prendra fin lorsque les taux atteindront leurs limites (légèrement en dessous de zéro), lorsque la perspective de rendement des actifs risqués sera presque aussi basse que le rendement de l’argent, et lorsque le besoin de liquidités pour payer pour le service de la dette, les retraites et les soins de santé augmenteront. S’il y a encore une petite marge de manœuvre pour doper les actifs et l’économie, elle est faible.

La plupart des gens pensent que les meilleurs « investissements risqués » sont et restent les actions et les actifs apparentés. Les investisseurs sont donc positionnés ainsi, ils possèdent des actifs affichant des rendements réels et nominaux faibles. Je pense qu’il est peu probable de voir à l’avenir des actifs affichant de bons rendements réels. Je pense que les actifs qui performeront le mieux sont ceux qui se comportent bien lorsque la valeur de la monnaie est dévaluée et lorsque les conflits domestiques et internationaux sont significatifs, par exemple l’or.

De plus, pour des raisons que j’expliquerai dans mon prochain article, la plupart des investisseurs sont sous-exposés à ces actifs. C’est pour cette raison que j’estime qu’acheter de l’or permet à la fois de réduire le risque, mais aussi d’améliorer le rendement d’un portefeuille.